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dimanche 18 décembre 2016

Questions autour du non-amendé (tib. ma bcos pa)




Extrait de la Compréhension suffisante qui intègre les manifestations (tib. snang ba lam 'khyer gyi rtogs pa cig chog)*


[Les représentations] sont bienveillantes. Quand il n'y en a pas, le non-amendé (tib. ma bcos pa) se développe de lui-même. Percevoir seul [le non-amendé] est stérile (tib. 'thums) et la non-représentation ne se produira pas à partir d'un état vague (tib. ra ri).[1] En outre, la nature du monde (tib. 'jig rten pa'i rang bzhin) doit rester telle qu'elle est (tib. rang ka ma). C'est ainsi, que le non-amendé qui ne fait pas l'objet d'un dissentiment ou assentiment, est compris comme la non-dualité qui se libère d'elle-même. Quelqu'un demanda alors au Seigneur du clan de sNyi[2]
- Cette pratique de l'absence de nature de la pensée, n'est-elle pas elle-même une voie intellectuelle (tib. blo mi 'gro ba) ?

- La pensée n'a pas de nature propre (sct. svabhāva). C'est de l'eau se dissolvant dans l'eau. Pas besoin de pratiquer cela en permanence.[3]


On retrouve ce sens ultime [des représentations] aussi dans les propos du mentor à-la-peau-de-chien[4].
- Mais, les êtres mondains laissent eux aussi se déployer librement leurs représentations. Il n'y a alors pas de différence avec un pratiquant qui laisse se déployer librement la perception ordinaire (tib. tha mal gyi shes pa) ?

- Il n'y a pas de différence, mais on peut se demander si les êtres mondains laissent aussi s'effacer les représentations d'elles-mêmes. Comme les êtres mondains ne disposent pas des instructions de réintégration, ils ne pourront pas reconnaître la non-dualité. Par conséquent, tout ce qu'ils font c'est donner leur dissentiment ou assentiment [à des représentations].

Même s'ils ont reçu ces instructions, comme la gnose de la non-dualité est indéfinissable (tib. nges med) et peut se présenter sous diverses formes, il est possible qu'ils ne fassent alors pas confiance à leur expérience et que celle-ci se manifeste sans libérer les représentations dualistes.

Il arrive que les adeptes religieux (tib. chos pa) font leur entraînement associé avec les souffrances dualistes de l'étude, la réflexion et la méditation. Si le pratiquant (yogi) est libre de la cause du dissentiment-assentiment, les représentations de la gnose de la non-dualité indéfinissable se présenteront sous les diverses formes de la plénitude. La différence entre ces deux approches dépend de si le point crucial (tib. gnad ka) est touché.

Quand on interroge des pratiquants sur la différence, ils la connaîtront. Les êtres mondains ne la connaîtront pas.

- Reconnaît-on [la non-dualité] par la pratique (tib. bsgoms nas), ou la reconnaît-on par la non-pratique ?

- Si on la reconnaît par la pratique, celle-ci deviendra [elle-même] une représentation. Si on la reconnaît sans la pratique (tib. ma bsgoms par), elle ne pourra pas s'effacer d'elle-même, ou si elle s'efface, elle se détériore puis s'en va.[5]


***

* Aussi connu sous les titres phyag rgya chen po'i rtsa ba la ngo sprad pa et phyag rgya chen po gnyug ma mi 'gyur

[1] La non-représentation n'est pas l'absence de représentation, mais le dépassement de la représentation et de l'absence de représentation.

[2] Gampopa

[3] Voir la loi de l’effort converti de l'école de Nancy, ou la méthode Coué. Voir aussi Michel Larroque, Volonté et involonté p. 143) :
"Le génie de Molinos est d'avoir découvert avant la nouvelle école de Nancy la loi de l'effort converti. Sans doute fin observateur, il constate que l'effort, dans certaines conditions, loin d'aboutir à un résultat positif se retourne contre le projet qui l'a suscité. C'est la raison pour laquelle il recommande de demeurer en paix, même dans les distractions ou les tentations et "Le pèlerin qui va à Rome, écrit-il, ne se dit pas continuellement "je vais à Rome". Il se contente de marcher. De même, celui qui est reçu par le roi extravague s'il répète sans cesse : "Sire c'est bien vous qui êtes devant moi". De même, il est inutile de faire des actes réfléchis dans l'oraison, et même dans la vie une fois qu'on l'a délibérément consacrée à Dieu."

[4] Khyi thul can, nom dérogatoire donné par des kadampa à Milarepa. Le nom dérogatoire est repris ici comme un ornement. C’est sans doute Gampopa qui pose les questions et qui rapporte les propos.

[5] Autrement dit, la représentation est nécessaire. La réalisation est de reconnaître « l’expérience » dans la représentation même.

Texte tibétain Wylie


khong bka' drin che/ khong dang ma phrad tsa na/ ma bcos pa rang sgom pa yin/ de rang du shes pa 'thums nas rtog med ra ri las ma byung*/ de bas 'jig rten pa'i rang bzhin rang ka ma song*/ khong gi des/ dgag sgrub (4na)med pa'i ma bcos pa de gnyis med rang grol gyi der go de nas/ rje btsun snyi sgom la/ - sems rang bzhin med par sgom pa de rang blo mi 'gro'am zhus pas/ 
- sems rang bzhin med do// chu la chu thim mo// rtag tu sgom mi dgos gsung*/ 

don gyi bla ma khyi thul can gyi gsung na 'dug go/ 
- 'o na 'jig rten pa rnams kyang rnam rtog rang gar ‘dug/ rnal 'byor pa yang rang ga tha mal gyi shes par 'dug pa la de gnyis la khyad par ci yod/ 
- khyad par med na 'jig rten pa la yang rang grol du mi 'gro'am snyam na/ 'jig rten pa la rnal 'byor pa'i gdams ngag med pas gnyis med ngo ma shes te/ dgag sgrub gnyis 'dzin 'ba' zhig byung ngo*// gdams ngag thob kyang*/ gnyis med kyi ye shes nges med sna tshogs su 'char ba la yid mi ches pas/ gnyis 'dzin gyi rnam rtog las grol sa med par skyes so//

chos pa rnams kyang*/ thos bsam sgom gsum gyi gnyis 'dzin gyi sdug bsngal gyis sbyangs so// rnal 'byor pa ni/ dgag sgrub kyi rgyu dang bral nas/ gnyis med kyi ye shes nges med kyi rnam rtog bde ba chen po sna tshogs su 'char ro//

- de gnyis kyi khyad par ni gnad ka de las byung ngo*// 
- rnal 'byor pa 'ga' zhig la de gnyis kyi khyad par dris tsa na/ rnal 'byor pas ngo shes pa yin/ 'jig rten pas ngo ma shes pa yin zer/ bsgoms nas ngo shes sam/ ma bsgoms nas ngo shes/ bsgoms nas ngo shes na rnam rtog tu 'gro/ma bsgoms par shes na rang grol du mi 'gro'am byas na rdugs nas 'gro bar 'dug go/




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